Venise, étrange cité lagunaire

Qu'elle est étrange, cette cité ! Paradoxale, même. Et c'est peut-être ce qui, depuis des siècles, fascine les voyageurs qui y posent le pied.

La Sérénissime a indéniablement du charme. L'eau de la lagune aux mille nuances de vert étincelant sous le soleil, cette masse liquide qui se fraie un chemin tortueux à travers le dédale de canaux qu'on a creusés pour elle, confère à Venise une atmosphère irréelle. On est fasciné par cette ville européenne unique en son genre (bien que Bruges ou Amsterdam - entre autres - aient aussi des canaux), qui est par ailleurs enveloppée de tout un folklore. Ville des amoureux, du carnaval ou cité aux mille palais, tous les qualificatifs existent.

Des palais, il y en a effectivement un grand nombre. Omniprésents le long du Grand Canal (enjambé par le célèbre pont du Rialto), beaucoup n'ont de palais que le nom et l'historique.
Car peut-on vraiment dire que ces hautes bâtisses sont des palais ? Ces demeures aux portes ouvragées et aux fenêtres richement décorées, mais dont le bois pourrissant et les façades abîmées occupent le reste... Il est surprenant de voir l'état de bon nombre de ces monuments, bâtisses abandonnées qu'à bord des vaporettos on peut admirer de tout son soûl. Là où autrefois vivaient de riches marchands commerçant à travers toute la lagune et la mer et partout.

La Sérénissime fascine, et je crois que c'est dû à son étrange alchimie entre le beau et le vétuste, qui crée somme toute quelque chose qu'on ne peut qu'aimer.

L'eau splendide, les ponts à un arc, les gondoles se balançant doucement, les façades colorées qu'un rayon de soleil colore, qu'un autre pâlit. Les îles au charme décuplé par les petites rues qu'occupent habitants et oiseaux, des petites rues aux fenêtres chargées de linge et à l'atmosphère printanière même si on est en hiver. Les quais loin à l'est là où les touristes ne vont pour la plupart pas, avec le soleil proférant à la lagune une atmosphère irréelle...

Et toujours ces multiples palais oubliés à la splendeur passée, ces ruelles étroites et étouffantes, ces logements tortueux, ces choses dont ne parle guère qui profèrent à Venise son improbable contradiction. Un fantasme, oui, Venise est un fantasme.

“Le poison de Venise, c’est la féerie d’une architecture de songe dans la douceur d’une atmosphère de soie ; ce sont les trésors des siècles, amassés là par une race de marchands et de pirates, la magnificence de l’Orient et de l’ancienne Byzance miraculeusement alliée à la grâce de l’art italien, les mosaïques de Saint-Marc et le revêtement rosé du palais ducal ; le poison de Venise, c’est la solitude de tant de palais déserts, le rêve des lagunes, le rythme nostalgique des gondoles, le grandiose de tant de ruines ; dans des colorations de perles —perles roses à l’aurore et noires au crépuscule —, le charme de tristesse et de splendeur de tant de gloires irrémédiablement disparues ; et dans le plus lyrique décor dont se soit jamais enivré le monde, la morbide langueur d’une pourriture sublime.”

Jean Lorrain, Pélleastres

La ville m'a incontestablement plu, comme un endroit à l'étrange alchimie charmeuse. Venise n'est pas belle, on l'aime et on la déteste à la fois. La cité de Vivaldi est étonnante et je dois dire que j'ai largement préféré les endroits dont on ne parle que peu aux lieux ultra touristiques (aka le Duomo, la place Saint-Marc ou le Palais des Doges) ; en dépit de leur histoire riche, ces endroits m'ont plutôt laissée... de marbre.

Connaissez-vous Venise ? Que vous inspire/vous a inspiré cette ville ?

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